La formation professionnelle dans le Code du travail : pilier de l’évolution des compétences

Le Code du travail français accorde une place prépondérante à la formation professionnelle, reconnaissant son rôle crucial dans l’adaptation des salariés aux mutations économiques et technologiques. Cet article examine en profondeur les dispositions légales encadrant ce domaine essentiel, offrant un éclairage expert sur les droits et obligations des employeurs et des salariés en matière de formation continue.

Les fondements juridiques de la formation professionnelle

La formation professionnelle trouve ses racines dans le Code du travail, principalement dans sa sixième partie intitulée « La formation professionnelle tout au long de la vie ». L’article L6111-1 pose le principe fondamental : « La formation professionnelle tout au long de la vie constitue une obligation nationale. Elle vise à permettre à chaque personne, indépendamment de son statut, d’acquérir et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle. »

Ce cadre légal s’est construit progressivement, avec des réformes majeures comme la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, puis la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Ces textes ont profondément remanié le système de formation professionnelle, introduisant notamment le Compte Personnel de Formation (CPF) et renforçant les obligations des employeurs.

Les droits des salariés à la formation

Le Code du travail garantit plusieurs droits aux salariés en matière de formation professionnelle. Le CPF, inscrit à l’article L6323-1, permet à tout actif d’acquérir des droits à la formation mobilisables tout au long de sa vie professionnelle. Chaque année, le compte est crédité de 500 euros (800 euros pour les salariés peu qualifiés), dans la limite d’un plafond de 5000 euros (8000 euros pour les moins qualifiés).

A lire également  Les enjeux de la protection des données personnelles en entreprise

En outre, l’article L6321-1 stipule que « L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. » Cette disposition fonde l’obligation de formation à la charge de l’employeur.

Le Conseil en Évolution Professionnelle (CEP), prévu à l’article L6111-6, offre un accompagnement gratuit pour élaborer et concrétiser un projet d’évolution professionnelle. Selon les chiffres de 2022, plus de 2 millions de personnes ont bénéficié de ce dispositif depuis sa création.

Les obligations des employeurs

Le Code du travail impose aux employeurs diverses obligations en matière de formation professionnelle. L’article L6312-1 prévoit que l’accès des salariés à des actions de formation professionnelle continue est assuré à l’initiative de l’employeur dans le cadre du plan de développement des compétences de l’entreprise.

Les entreprises sont tenues de verser une contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance, dont le taux varie selon la taille de l’entreprise (0,55% de la masse salariale pour les entreprises de moins de 11 salariés, 1% au-delà). Cette obligation est définie à l’article L6131-2 du Code du travail.

L’entretien professionnel, prévu à l’article L6315-1, doit être organisé tous les deux ans pour chaque salarié. Il vise à étudier les perspectives d’évolution professionnelle du salarié et les formations qui peuvent y contribuer. Tous les six ans, cet entretien doit faire un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié.

Les dispositifs spécifiques de formation

Le Code du travail prévoit plusieurs dispositifs spécifiques de formation. Le contrat d’apprentissage, régi par les articles L6221-1 et suivants, permet aux jeunes de 16 à 29 ans de suivre une formation en alternance. En 2022, plus de 800 000 contrats d’apprentissage ont été signés, un chiffre en constante augmentation.

A lire également  Mise en demeure et contrôle de l'industrie aérospatiale

Le contrat de professionnalisation, défini aux articles L6325-1 et suivants, s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans, aux demandeurs d’emploi de 26 ans et plus, et aux bénéficiaires de certains minima sociaux. Il alterne périodes de formation et périodes en entreprise.

La Validation des Acquis de l’Expérience (VAE), inscrite à l’article L6411-1, permet d’obtenir une certification professionnelle en valorisant son expérience. En 2021, environ 30 000 personnes ont obtenu une certification par cette voie.

Le contentieux de la formation professionnelle

Le non-respect des obligations en matière de formation professionnelle peut donner lieu à un contentieux devant les Conseils de Prud’hommes. La jurisprudence a notamment précisé la portée de l’obligation de formation de l’employeur. Dans un arrêt du 5 juin 2019 (n° 17-23.869), la Cour de cassation a rappelé que « l’employeur doit assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations ».

Le manquement à cette obligation peut justifier la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur. Dans certains cas, il peut même caractériser un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à des dommages et intérêts pour le salarié.

Les litiges peuvent également porter sur l’utilisation du CPF, notamment en cas de refus de l’employeur d’accorder une autorisation d’absence pour suivre une formation. L’article L6323-17 du Code du travail encadre strictement les motifs de refus admissibles.

Les perspectives d’évolution du cadre légal

Le cadre légal de la formation professionnelle est en constante évolution pour s’adapter aux mutations du monde du travail. Les débats actuels portent notamment sur le renforcement de l’accompagnement des salariés dans leur parcours de formation, l’amélioration de l’accès à la formation pour les travailleurs indépendants et les demandeurs d’emploi, et l’adaptation des dispositifs aux enjeux de la transition écologique et numérique.

A lire également  Suspension administrative du permis de conduire : ce que vous devez savoir

Des réflexions sont en cours pour simplifier encore le système de formation professionnelle, jugé parfois trop complexe par les usagers. Une étude de la DARES de 2023 montre que seulement 60% des salariés se disent bien informés sur leurs droits à la formation, soulignant la nécessité d’améliorer la communication sur ces dispositifs.

La place de la formation professionnelle dans le Code du travail témoigne de son importance cruciale dans le paysage social et économique français. Elle constitue un levier majeur pour l’adaptation des compétences aux évolutions du marché du travail et pour la sécurisation des parcours professionnels. Les employeurs et les salariés doivent rester vigilants quant à leurs droits et obligations dans ce domaine en constante mutation.

Partager cet article

Publications qui pourraient vous intéresser

Dans un contexte où les innovations médicales se multiplient, la question de la responsabilité des fabricants de dispositifs médicaux devient cruciale. Entre sécurité des patients...

Face à l’escalade des violences envers les représentants locaux, une législation inédite vient d’être promulguée. La loi n° 2024-247 du 21 mars 2024 offre désormais...

Le refus de divorcer d’un conjoint peut plonger un couple dans une impasse juridique et émotionnelle complexe. Quelles sont vos options lorsque votre femme refuse...

Ces articles devraient vous plaire